2019

La filière du miscanthus

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Travail réalisé par Noémie Vereecke

Le Bassin Minier est un territoire en crise sociale, démographique et économique. Depuis la fermeture des mines en 1990, de nombreux projets ont vu le jour mais les indicateurs sociaux-économiques demeurent très préoccupants. On y trouve une dynamique associative particulièrement importante, issue de l’histoire minière, mais également un fort sentiment de relégation. Le territoire possède un patrimoine architectural et paysager de grande qualité mais peu de moyens pour le rénover en raison d’une attractivité faible. Les habitants souffrent d’une grande précarité énergétique. C’est donc dans une situation d’économie faible que la transformation environnementale, architecturale et paysagère se pose. Mais n’est-ce pas ce qui attend les architectes et les paysagistes de demain : penser la transformation du déjà-là, rénover, adapter, transformer avec peu de moyens ? L’atelier considère que l’architecture et le paysage peuvent contribuer, avec leurs outils, à la transformation sociale, économique et écologique du quartier. Les objectifs du semestre vise à mettre en résonnance un contexte historique majeur (Le Bassin Minier Patrimoine Mondial de l’Unesco) avec les débats contemporains de transition écologique. L’approche du projet mène à prendre position pour une démarche inclusive dans le domaine de la culture et du patrimoine. L’atelier s’inscrit dans la démarche « futur urbain, human-centred cities » promue par le rapport mondial de l’UNESCO de 2016. Le patrimoine (bâti, urbain, paysager) devient indissociable des histoires humaines et culturelles. L’objectif est aussi d’interroger le rôle social de l’architecture et du paysage.

Aujourd’hui, la réhabilitation des maisons est un sujet incontournable pour les ar- chitectes. Notre société ne pourra bientôt plus construire aussi facilement de nouveaux bâtiments et devra donc s’intéresser de plus en plus à la restauration des édifices existants et à leurs possibles extensions. Malgré l’appartenance au domaine histoire, notre atelier s’est intéressé aux diffé- rentes problématiques que proposaient les autres domaines d’études. S’intéresser à l’his- toire ne se limite pas à la simple réponse aux questions patrimoniales, c’est aussi prendre en considération les questions sociétales, environnementales, territoriales. La cité Nouméa, que nous avons étudié ce semestre, est classée au patrimoine de l'Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Sicence et la Culture (UNESCO) comme patrimoine mondial évolutif et vivant. Et c’est en ça que nous cherchons à répondre, un patrimoine vivant, non figé, qui est voué à évoluer dans le temps et à se renouveler avec les problématiques d’aujourd’hui.

Aujourd’hui, être architecte, c’est être polyvalent plus que jamais. Il n’est plus possible de concevoir sans penser à l’environnement, à l’impact écologique, aux énergies et à la biodiversité, permettant, au delà de ce qui peut sembler une « contrainte », d’en faire un atout. C’est avec ces constats qu’a démarré la conception du projet. Je suis très heureuse d’avoir eu la chance de développer mon projet de fin d’étude dans un atelier prenant vrai- ment à cœur ces problématiques, que je n’ai pu que très peu développer durant mon cursus à l’école. Intervenir au sein de la cité minière de Nouméa à Rouvroy, c’est lancer un processus, pouvant s’étaler à l’échelle du grand territoire du bassin minier. C’est un territoire vaste qui, depuis la fermeture des mines, garde un passé fortement inscrit dans la mémoire du lieu. Une partie de ces cités a aujourd’hui du mal à survivre depuis que les activités ont ces- sé dans ces villes, laissant un patrimoine qui appartient au passé se dégrader peu à peu, et rendant les villes peu attractives. Cependant, certaines villes comme Loos en Gohelle dans le Pas-de-Calais, ont su faire une force de leur héritage minier, et profiter de cette extinction d’activité pour lancer de nouvelles dynamiques et de nouvelles attractivités. La plupart des habitants des cités minières ont une histoire passée avec celle-ci, ayant par exemple un parent lié au travail à la mine. Aujourd’hui, on peut observer à Rouvroy, une partie importante de personnes âgées à la retraite (31,5%), ainsi que de personnes au chômage (20%). La vile peine à se réactiver depuis la fermeture des mines. Il y a pourtant du potentiel dans ces villes minières. Les cités ont souvent été construites comme élément de publicité pour attirer les futurs mineurs à venir travailler dans leur compagnie. Les maisons ont donc une certaine modénature avec le dessin de la brique, les parcelles de jardins sont généreuses et permettaient autrfois un cadre de vie confortable pour les familles de mineurs. A Rouvroy, dans la cité Nouméa, les maisons n’adoptent pas la forme de Corons, comme beaucoup de cité minière, et offrent des logements jumelés par deux.

Aujourd’hui, les logements ne sont plus forcements adaptés aux besoins des nouveaux occupants. Elles sont parfois trop petites, d’autres sont trop grandes, avec des parcelles plus ou moins entretenues, dévalorisant l’image de l’habitation. Les habitants sont tous locataires de la cité, géré par le bailleur social SIA. Il s’agit donc d’un ensemble de logements sociaux. Lors du workshop effectué à Rouvroy en compagnie d’étudiants florentin, travaillant eux aussi sur le bassin minier, il était intéressant d’avoir leur regard sur la cité minière. Ils nous ont fait remarqué que, avoir un ensemble de logements géré par un bailleur social s’agissait d’une chance. A Florence, cela n’existe plus. La gérance par le bailleur social peut effectivement être perçue comme une opportunité de renouvellement de l’ensemble de la cité, permettant d’agir à une échelle plus globale, à l’échelle du territoire, tout en intervenant sur l’habitat individuel, se rapprochant alors de la théorie de Alberto Magnaghi dans son livre sur la bio région urbaine. Celui-ci nous fait part dans cet ouvrage du constat d’une déterritorialisation du territoire, dont il tente d’exprimer le contrepied par l’alternative du « développement local auto soutenable » au service de l’approche territorialiste. C’est à travers cette notion développée par Alberto Magnaghi que nous tenterons de mettre en place le projet, dans un processus de renouvellement de la maison minière, à l’ensemble d’un ilot, à la cité Nouméa, à la ville de Rouvroy, et pour finir à l’ensemble du Bassin minier. Le patrimoine du bassin minier, c’est avant tout son sol, qui a été, durant cette dyna- mique d’exploitation du charbon, une richesse d’ordre économique, énergétique, mais qui a aussi causé beaucoup de soucis, notamment pour la santé du personnel y travaillant, mais aussi des habitants, par le côtoiement de métaux lourds, de poussières, de conditions de travail, et d’ordre écologique, en perturbant l’équilibre des sols par les galeries creusées et par l’extraction du charbon. Cette exploitation du sol est encore bien visible dans les paysages des villes mi- nières. On les reconnaît par leurs grands terrils de couleur noire, composés de schistes, les déchets de l’exploitation du charbon. Ces terrils sont identifiables dans la ligne d’horizon comme les points hauts de la composition du paysage du bassin minier. En ce qui concerne la ville de Rouvroy, il s’agit du seul patrimoine que l’on peut directement identifier comme celui du domaine de production de la mine, ne disposant au- jourd’hui plus d’éléments architecturaux de l’exploitation du charbon tel que le chevalement, la salle des pendus...

Le sol prend donc une importance certaine dans le projet du renouvellement de la cité. Son épaisseur, ses qualités, ses contraintes, son passé, son exploitation, deviennent des supports de projet. Revenir au sol permet de reprendre le patrimoine minier à son com- mencement, et le lier également à son histoire avant la mine : celle d’un sol exploité pour les richesses agricoles. Le processus du projet s’articule donc à travers cette notion de patrimoine du sol, à l’échelle du grand territoire, par une dynamique de reconquête de la parcelle individuelle, la rendant attractif, et la faisant suivre le classement au patrimoine de l’Unesco comme patri- moine vivant et évolutif.

Nous développerons donc dans une première partie le constat du patrimoine minier, notamment celui de Rouvroy, de sa cité, ses maisons et ses parcelles individuelles comme potentiel de rénovation de la cité minière. Dans un second temps, nous développerons le processus mis en place de réappro priation des sols à travers la dépollution par la phytotechnologie, et notamment par le miscanthus, qui sera réintroduit comme bio-matériau au service de l’architecture et donc de la rénovation de la cité. Enfin, dans une troisième partie, nous décrirons la démarche adoptée pour le développement du projet au sein d’un ilot de la cité Nouméa.

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